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HPE : une étiquette séduisante mais sans fondement scientifique

Le sigle, pour Haut Potentiel Émotionnel, s’est largement diffusé dans le discours grand public. Il est souvent perçu comme une explication à des émotions intenses, une hypersensibilité, une grande empathie ou une fatigue émotionnelle au quotidien.

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Pourtant, le HPE n’a aucune reconnaissance scientifique ni clinique : il n’existe ni définition consensuelle, ni outil d’évaluation validé, ni critères officiels. Ce n’est pas une catégorie diagnostique, mais un concept flou, issu du développement personnel et popularisé par les réseaux sociaux, les livres à succès et les tests en ligne.


HPI vs HPE : deux réalités très différentes



Cette confusion vient en partie du rapprochement fréquent entre HPI (Haut Potentiel Intellectuel) et HPE. Pourtant, ces deux notions n’ont rien de comparable sur le plan scientifique.

Le HPI repose sur une base objective et mesurable. Il est évalué à l’aide de tests psychométriques standardisés et étalonnés, comme le WISC-V (enfants) ou le WAIS-IV (adultes). Ces tests sont passés et interprétés par des psychologues habilités et reposent sur des normes internationales. Un QI total égal ou supérieur à 130 correspond à environ 2,2 % de la population. Le HPI est donc une catégorie statistique objectivable, reconnue et encadrée.

Le HPE, à l’inverse :

  • n’a aucune définition scientifique consensuelle,

  • n’est reconnu par aucune classification internationale (DSM-5, CIM-11),

  • ne dispose d’aucun outil de mesure validé,

  • et repose majoritairement sur de l’auto-identification ou des profils génériques.


Autrement dit, le HPI est mesurable et reconnu ; le HPE est un concept médiatique, non validé. (cf le recap visuel ci-dessous)


Comparatif HPi/HPE

Quand une étiquette se construit sur du sable


La neuropsychologue Cassandre Bascio (compte Instagram Ma vie de neuropsy, que j’apprécie particulièrement pour la clarté et la rigueur de ses contenus) a récemment pris la parole dans une vidéo que je partage ici, pour dire clairement : « Il est temps d’arrêter de parler de HPE ».

Elle y explique notamment que cette notion repose très souvent sur l’effet Barnum : un phénomène bien connu en psychologie, qui consiste à se reconnaître dans des descriptions vagues et générales parce qu’elles paraissent très personnelles. Beaucoup de profils HPE sont si larges qu’ils peuvent correspondre à une grande partie de la population... ce qui explique leur succès… et leur danger de surinterprétation.


Des fondements théoriques fragiles


Le HPE s’appuie souvent sur le concept d’intelligence émotionnelle (IE). Or, celui-ci fait lui aussi l’objet de critiques importantes.

Dans Why Emotional Intelligence Is an Invalid Concept (2005), Edwin A. Locke montre que l’IE :


  • n’est pas une véritable intelligence au sens cognitif du terme,

  • repose sur une définition trop large et hétérogène,

  • mélange des traits de personnalité, des compétences sociales et des habiletés émotionnelles,

  • et ne dispose pas d’un noyau conceptuel clair qui en ferait une entité scientifique robuste.


Si l’IE repose sur des bases déjà fragiles, le HPE, qui en est une extrapolation, se révèle encore plus inconsistant.


Mieux comprendre plutôt qu’étiqueter


Le HPE n’est ni une catégorie diagnostique, ni un outil d’évaluation fiable. C’est une construction séduisante… mais scientifiquement creuse.

L’enjeu n’est pas de déterminer si quelqu’un “est” ou “n’est pas HPE”, mais de comprendre :


  • comment il ou elle ressent et régule ses émotions,

  • quelles sont ses vulnérabilités et ses ressources,

  • et quelles stratégies peuvent favoriser un meilleur équilibre émotionnel.


Donc, s'il faut retenir une chose : parler de HPE, c’est séduisant… mais scientifiquement, le concept ne repose sur rien de solide. Parler de fonctionnement émotionnel réel, en revanche, permet un accompagnement rigoureux, nuancé et efficace.


Sources : Locke, E. A. (2005). Why Emotional Intelligence Is an Invalid Concept. Journal of Organizational Behavior, 26(4), 425–431. Mayer, J. D., Salovey, P., & Caruso, D. R. (2000). Models of Emotional Intelligence. In R. J. Sternberg (Ed.), Handbook of Intelligence (2nd ed.). Cambridge University Press. Locke, E. A. (2005). Critiques of Emotional Intelligence: What Are the Problems and How Can They Be Fixed? Industrial and Organizational Psychology, 3(2), 161–164. Goleman, D. (1995). Emotional Intelligence: Why It Can Matter More Than IQ. Bantam Books. Wechsler, D. (2014). Wechsler Intelligence Scale for Children – Fifth Edition (WISC-V). Pearson. Wechsler, D. (2008). Wechsler Adult Intelligence Scale – Fourth Edition (WAIS-IV). Pearson. American Psychiatric Association. (2013). Diagnostic and Statistical Manual of Mental Disorders (DSM-5). World Health Organization. (2019). International Classification of Diseases (ICD-11).Frontiers in Psychology (2019). A Meta-Analytic Investigation of the Relationship Between Emotional Intelligence and Life Outcomes. Cairn.info (2023). Idées reçues sur le haut potentiel intellectuel. Instagram – Cassandre Bascio, Ma vie de neuropsy (2025). Vidéo sur l’effet Barnum et la remise en question du concept de HPE.

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